Bernard Ducarroz nous a quittés....

Bernard a vécu avec nous les deux premières années des Colporteurs.

Les années de tâtonnement, la construction des modules, nos méthodes de travail, le premier spectacle abouti : « Gens d'ici », les représentations tout terrain, et le Petit Kursaal pour mesurer périodiquement le chemin parcouru.

Chez nous, il était « Éloi », un drôle de bonhomme un peu penché, matois, un peu benêt parfois, et si touchant dans « Le serpent-minute » de Rufus qui fut son morceau de bravoure, et reste pour nous un très beau souvenir de lui (voir paroles ci-dessous).


Pour l'adieu à Bernard Ducarroz

 

J'ai jamais appris à chanter

Mais j'ai chanté comme on respire

Simplement respiré chanté

Comme on respire : on respire

Je ne chantais pas l'espérance

Ni la foi ni la partition

En chantant j'étais l'espérance

J'étais le chant, j'étais le don.

Puis il y eut le soir qui penche

Puis il y eut le soir tout court

Et dans la nuit, la mort qui court

 

Ta chanson, Bernard, était un

théâtre sombre

Au décor habillé d'humour

pour la pudeur à l'avant-scène.

Tes coulisses s'ouvraient sur

des cavernes profondes

Où l'on puisait ce qui

nous aide dans le noir…

ce qui est beau à voir…

ce qui est bon à chanter…

Tu étais… de la bonté des faibles.

Bernard aimait. Que tout renaisse.

Jean Martin, le 27 novembre 2014.


LE SERPENT-MINUTE

texte: Rufus -
musique: JM Sénia

 

Voulez-vous être ma compagne

et mon amie d'enfance

j'ai goûté le bout de vos seins

et j'en reprendrais bien

m'accorderez-vous d'autres rondes

avant la fin du monde

nous serons à tu et à toi

mais moi surtout à toi

 

REFRAIN

je te regarde depuis un instant

je t'attendais depuis cent ans déjà

nous trahirons dès que nos yeux

se quitteront

je t'aimerai par-delà les trahisons

 

si l'on se perd si la nuit tombe

à l'autre bout du monde

tu ne seras jamais mordue

par un serpent-minute

cette fois nous n'arriverons plus

trop tard à l'hôpital

tu seras toujours vivante

tu n'auras pas mal

 

REFRAIN

 

pendant la minute de silence

je ne me tairai pas

j'échaperai à la démence

la vie me reprendra

en rentrant je n'irai pas mettre

le feu à la maison

je ne laisserai pas dans

les flammes

s'envoler ma raison

 

REFRAIN

 

tu ne me diras pas je t'aime

jamais sauf quelque fois

on ne devra plus m'enfermer

à l'asile d'aliénés

nous aurons du temps pour

nos enfants

et eux du temps pour nous

je serai ton fou toi ma folle

et nous aurons des chats

 

tu sais comment on fait les enfants?

je vais te le dire parce que c'est toi

les enfants c'est le plaisir qui les fait

c'est pas ordinaire ça!

comment que du plaisir peut se

transformer dans de la vie

c'est impossible! Impossible?

c'est la propagande qui dit ça

que c'est impossible et

absolument inenvisageable!

que c'est la chimie qui fait ça

ou la biologie animale

et pourquoi pas la gynécologie!

non je te dis ça parce que c'est toi...

quand même

pouvoir se dire

au premier instant de mon existence

il y a le plaisir

c'est fou

c'est fou eh bien moi

je m'en souviens

mais c'est un secret que les enfants

gardent

ils disent à leurs parents

non non je ne me souviens pas de ce

moment-là

les parents non plus d'ailleurs

n'est-ce pas?

ils ont fait semblant de rien

c'est normal...

c'est comme quand on regarde

le soleil

il faut mettre un écran total

pour protéger ses yeux

il faut faire semblant de rien

et c'est au poil

après on ne se rend même plus

compte

qu'on fait semblant

 

REFRAIN